Exposition : Courbet au Grand Palais

Publié par Stéphanie on dimanche, janvier 20, 2008

Présentation :
Cette exposition-événement présente 120 peintures, une trentaine d'œuvres graphiques et environ 60 photographies sur un parcours de 1500 m². Depuis 1977 (date de la dernière grande monographie consacrée à l’artiste à Paris), de nombreuses recherches en France et à l'étranger ont permis de proposer de nouvelles lectures de l'œuvre de Courbet (1819-1877), dans le contexte de la création artistique des années 1840-1860.
Cette rétrospective souligne la complexité de l’œuvre de Courbet, de ses liens parfois paradoxaux avec la représentation du réel et la tradition picturale. Elle réévalue la place de l'artiste dans son époque, analyse ses liens avec les autres arts, la photographie en particulier. L’exposition donne aussi les clefs de compréhension d’une œuvre protéiforme, de l'énoncé réaliste des années 1848-1855 et de ses conséquences pour l’histoire de l’art. Cette approche permet de s'interroger autant sur la nature du réalisme de Courbet que sur la place de la culture romantique dans son œuvre. Elle met en lumière une influence qui fut décisive pour les tenants de la "Nouvelle Peinture" des années 1860 et les débuts de l'impressionnisme.
(source : site officiel de l'exposition)

Mon avis (en italique, le texte de l'exposition) :
C'est avec le meilleur a priori que je suis allée ce matin voir l'exposition Courbet puisque :
- j'ai décidé de combler mes lacunes abyssales cette année en histoire de l'Art
- j'apprécie énormément le portrait de l'artiste dit le Désespéré (1844-1845) qui tient lieu d'affiche pour cette exposition
- et cette visite m'avait été chaudement recommandée par plusieurs personnes.

Et c'est avec un grand sourire de satisfaction que je suis ressortie du grand Palais.

Le parti pris de présenter l'œuvre par thème permet un excellent découpage et une très bonne compréhension de l'œuvre de cet artiste.
Et j'ai pu ainsi par exemple voir très facilement l'évolution du style

L'exposition s'articule donc autour de huit sections :

L’invention de Courbet : les autoportraits de jeunesse.
Cette section rassemble pour la première fois un ensemble important des autoportraits peints et dessinés de 1840 à 1855.

Seul ce fameux portrait de l'artiste dit le désespéré sort réellement du lot. Il est d'ailleurs troublant de le voir exposé au milieu de deux autres toiles qui n'auraient même pas attiré mon regard si la signature Courbet n'était pas dessus. (jugement qui n'engage bien sur que moi, mais j'ai mentalement qualifié ces toiles de croutes!).
Une autre toile m'a marquée (représentée ci-contre), Les amants dans la campagne, sentiment du jeune age dit aussi les amants heureux (1844). En la voyant, j'ai eu l'impression d'un mauvais cadrage (que je ne retrouve pas sur cette reproduction d'ailleurs), et pourtant grâce à l'effet prise de vue par en dessous le résultat est plus que probant.

De l’intime à l’Histoire.

Toute sa vie Courbet demeura fidèle à ses racines familiales et à sa terre natale. Elles lui inspirent ses premières grandes toiles, affirmations de sa création artistique.
Ici, j'ai vraiment touché l'évolution du peintre. Dans les années 1840, un style très photographique, extrêmement détaillé comme dans ce portrait de Juliette Courbet datant de 1845. Je trouve même qu'il y a un très léger défaut de perspective entre la tête et le reste du corps.

Peu à peu, l'œil du peintre se forge et il nous impose alors sa propre vision de ses personnages. De même, les couleurs deviennent plus sombres.

Les manifestes.
Autour de L'Enterrement à Ornans et de L'Atelier du peintre, exceptionnellement déplacés du Musée d'Orsay au Grand Palais, cette section met en évidence la cohérence de l'ambition artistique de Courbet au début des années 1850 et sa mise en scène par le peintre lui-même.

J'avoue par contre être passée totalement à côté d'un Enterrement à Ornans (1849-50). Elle ne m'a pas touchée, je ne comprends pas tout simplement, et pourtant cela semble l'une des oeuvres importantes de Courbet.



Une oeuvre qui m'a plus marquée est L'atelier du peintre, allégorie réelle déterminant une phase de 7 années de ma vie artirtisque (1855). Près de trente personnes sont représentées alors qu'il n'y a que Courbet et 2 modèles.
Moi qui imaginais un peintre ayant besoin de solitude pour peindre :)... Delphine m'a d'ailleurs fait remarqué qu'on reconnaissait sur la droite Baudelaire dont un portrait (identique) et une photographie sont exposées juste à côté.
Pour anecdote : une caricature de ce tableau est exposée avec comme légende le titre suivit de "où il prouve victorieusement qu'il n'a jamais eu de maitre ... de perspective".

Un autre intérêt de cette salle sont les photos d'époques qui font échos aux tableaux.

Paysages.
La section s'articule autour des deux belles séries consacrées aux grottes de la Loue et aux vagues normandes dont les versions les plus importantes sont rassemblées. Cette thématique permet d'explorer avec pertinence les liens avec la photographie contemporaine – Le Gray, Le Secq, Giroux notamment.

Troublant... Troublant car la même année (1855), il peint Les roches de Mouthier que j'ai trouvé totalement sans intérêt (mais bon avis personnel, bien sur) et Le ruisseau du puit noir, vallée de la Loue, qui m'a marquée (dans la limite du raisonnable puisqu'il s'agit d'un paysage)


3 tableaux totalement inattendus dans un coin de la salle
: Mer calme (1869), 1/3 mer et plage, 2/3 ciel de nuages blancs avec juste 2 bateaux échoués sur le sable ainsi le bord de mer de Palevas, représenté ci-contre (1854). Après une série de tableaux sombres, la luminosité dégagée par ces œuvres est d'autant plus frappante.



La tentation moderne.

Durant les années 1860, Courbet, alors au faite de sa célébrité, est une référence essentielle pour la génération montante de la Nouvelle peinture et des débuts de l'Impressionnisme; l'œuvre de ces jeunes peintres stimule à rebours Courbet, notamment autour du portrait et du sujet moderne.
Beaucoup de portrait. J'avoue ne pas avoir compris l'explication donnée à l'entrée : "évolution de sa peinture du vrai vers le moderne".
Visiblement avant les portraits de Courbet étaient des représentations des gens sous leur nom (donc le réel) et ensuite il les a utilisé comme modèle pour d'autres personnage (historique ou nom), mais pourquoi alors parler de moderne pour une démarche utilisée depuis toujours?
Si quelqu'un a une explication?


Le nu, la tradition transgressée.

Le nu féminin est un des enjeux majeurs pour Courbet qui peint ses premiers nus dans les années 1840. La présentation des Baigneuses en 1853 (musée Fabre, Montpellier) lui permet d'affirmer sa fidélité à la tradition et sa volonté d'un renouveau réaliste.


Evidemment la pièce phare est L'origine du monde. (1866)
On y trouve également La femme au perroquet (1866) dont j'ai préféré une Etude pour la femme au perroquet qui est un cadrage sur le visage de cette femme et une peinture plus sombre.


Le peintre en chasseur mélancolique.

Les œuvres liées à la chasse ont souvent été négligées par les historiens d'art. Elles occupent pourtant une place essentielle, au regard de la peinture d'histoire, valorisée dans l'exposition par la présentation autour des grands formats – L'Hallali du cerf (1866), Le Combat de cerfs (1861) – de l'ensemble des œuvres essentielles de cette thématique.




L'expérience de l'histoire : Courbet et la Commune.
Courbet avait toujours entretenu des liens complexes avec le politique. Il s'engage pour la première fois dans l'action à l'occasion du siège de Paris et de la Commune où il préside la Fédération des Artistes. L'artiste paiera cette implication politique, notamment les conséquences de la destruction de la colonne Vendôme. Emprisonné, malade, contraint à l'exil en Suisse à partir de 1873, Courbet est un artiste désormais survivant. A l'exception de l'Autoportrait à Sainte-Pélagie (1861, musée départemental Gustave Courbet Ornans), le peintre n'a pas traité directement les événements dont il fut témoin et acteur. La série mélancolique de natures mortes, peintes entre 1871 et 1873, lui permet d'exprimer son désarroi. L'exposition se conclut sur la présentation rare des trois tableaux consacrés aux Truites de la Loue, métaphores de l'artiste et de son destin douloureux.
Ces trois tableaux m'ont laissée sceptique. J'avoue que le parallèle entre ces trois natures mortes et le destin de l'artiste...

En tous cas, une excellente exposition que je conseille à tous les parisiens ou ceux qui ont la chance de monter à la capitale cette semaine. Dépêchez vous!

Informations pratiques :
Dates
: du 13 octobre 2007 au 28 janvier 2008 (il reste donc que peu de temps!)
Tous les jours sauf les mardis aux Galeries nationales du Grand Palais
Horaires
: Tous les jours de 10h à 22h sauf le jeudi jusqu'à 20h
(dernier accès : 45 mn avant la fermeture des caisses)

Pour aller plus loin :
Le site de l'exposition présente un très bel ensemble de photos des œuvres
Bien sur tous les articles de Wikipédia (plusieurs liens dans mon billet sont sur ces articles)

14 commentaires:

Comment by Anonyme on 21 janvier 2008 à 02:02

Merci pour cette visite guidée! je ne connaissais que deux toiles de cet artiste... les deux plus connues, bien sur! Contente d'en apprendre davantage!

 
Comment by Anonyme on 21 janvier 2008 à 07:13

Très chouette billet, pour ma part,ce sera une expo que j'aurai ratée, tant pis!

 
Comment by Anonyme on 21 janvier 2008 à 09:03

bravo!

 
Comment by Anonyme on 21 janvier 2008 à 09:16

Trop loin, trop tard !!! dommage ça fait envie à te lire :-)

 
Comment by Anonyme on 21 janvier 2008 à 10:22

que j'aimerai pouvoir venir à pris plus souvent pour tout ça !!!

 
Comment by Caro[line] on 21 janvier 2008 à 10:59

Merci pour ce compte-rendu, Stéphanie ! Mais je crois que je vais passer mon tour sur cette expo... moi et l'art... hum hum. ;-)

 
Comment by Anonyme on 21 janvier 2008 à 15:12

Très sympa ce compte rendu, j'ai été voir cette expo et tout comme toi j'en ai été absolument ravie. Tout comme celles d'Ingres, ces peintures sont d'un réalisme impressionnant (d'où bien sûr le nom du mouvement).
J'ai beaucoup aimé Le sommeil ainsi que Le désespéré qui est d'après moi son autoportrait le plus réussi.
D'ailleurs, Le désespéré illustre Le horla de Maupassant dans la collection le livre de poche et je trouve qu'il va très bien avec la nouvelle.
A celles qui peuvent y aller, je vous la conseille vivement.

 
Comment by Anonyme on 21 janvier 2008 à 15:53

C'est une expo que j'ai beaucoup appréciée, comme toi pour la qualité de la scénographie et l'intelligence avec laquelle elle a été conçue! Et puis, c'est un oeuvre vraiment agréable. La seule partie que je n'ai guère aimée est celle des scènes de chasse! Beurk!

 
Comment by Anonyme on 21 janvier 2008 à 16:24

J'ai eu la même réaction de dégoût concernant les tableaux de chasse et j'ai trouvé d'ailleurs dommage de finir l'expo sur cette note glauque. Mais bon, c'est le seul bémol.

 
Comment by Stéphanie on 21 janvier 2008 à 23:25

@Karine : de rien :) L'expo m'a tellement enchantée que je suis heureuse de partager un peu de mon émerveillement ;)

@Fashion : tu en verras d'autres

@Amanda : merci :)

@Yueyin : c'est aussi pour ces opportunités que j'adore vivre en RP

@Goelen : il ne faut pas hésiter! Et les blogueuses parisiennes devraient bientôt te donner une bonne opportunité!

@Caro[line] : alors vais essayer de te convaincre pour une prochaine expo ;) Tu as bien réussi à me convertir aux blogs littéraires, et aux salons ;))

@Slo : le désespéré m'a également marquée en illustration du Horla, on reconnait les LCA ;D

@Chiffonette : idem pour la chasse
Et à propos de cette expo, j'ai d'autant plus apprécié ces sections logiques que généralement au grand palais je trouve souvent les expos mal organisées.

 
Comment by Anonyme on 22 janvier 2008 à 10:48

Dommage que j'habite si loin, car j'aurais beaucoup aimé voir cette exposition surtout après le livre de François Dupeyron "Le Grand Soir" qui m'a fait connaître ce peintre :

http://www.leslecturesdeflorinette.com/article-4601603.html

Merci beaucoup pour ton beau billet de consolation !! :-)))

 
Comment by Anonyme on 22 janvier 2008 à 11:09

Florinette, merci pour l'info ! en plus je viens de voir qu'il sort en poche à la fin du mois :-) C'est pas très cool pour ma PAL :-(

 
Comment by freude on 23 janvier 2008 à 09:00

Et voilà, c'est en lisant des billets comme ça que je regrette de ne plus être parisienne... Ah les expos du grand palais... Bon allez on positive : le musée d'histoire naturelle de Toulouse rouvre ses portes le 26 janvier aprè 10 ans de fermeture !

 
Comment by Lyvie on 25 janvier 2008 à 18:24

Quel beau billet! ça a l'air d'une bien belle exposition..., pour ma part, je vais me contenter du lien vers le site de l'expo...